12.04.2017
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Le grand public est de plus en plus conscient de l’intérêt d’utiliser des ressources renouvelables, aussi bien pour de nouveaux carburants que comme matière première pour la chimie. Celles issues du monde végétal, dites bio-ressources, sont de plus en plus prisées en ce sens, en particulier celles de seconde génération qui proviennent des résidus non alimentaires de l’agriculture comme le bois ou la paille. IFPEN est très engagé dans cette voie depuis plusieurs années et est déjà impliqué dans des actions de démonstration industrielle, tout en poursuivant des activités de recherche nécessaires à la production des connaissances et des modèles/outils qui sont requis pour l’amélioration des procédés concernés.
Les substances biosourcées que l’on souhaite substituer aux ressources fossiles, renferment des familles moléculaires très différentes de celles généralement connues dans le monde du pétrole, et qui sont employées depuis des décennies dans les filières du raffinage et de la pétrochimie. Contrairement aux « fossiles » qui sont des hydrocarbures (molécules uniquement basées sur le carbone et l’hydrogène), on rencontre dans le biosourcé des substances dites « oxygénées » contenant par exemple des fonctions alcool, acide, ether ou ester.
Or, ces dernières créent des polarités et des liaisons hydrogène, qui modifient les affinités des espèces entre elles, phénomène très peu observé dans des mélanges hydrocarbonés.
Création de « liaisons hydrogène » dans des mélanges de molécules oxygénées.
Les conséquences de ces phénomènes sur les propriétés des mélanges sont importantes, car elles ont un impact sur leur mise en œuvre dans les procédés industriels existants. Typiquement, on constate que certains produits ne sont pas miscibles à l’état liquide (comme dans le cas de l’eau avec l’huile), tandis que d’autres se mélangent bien mais peuvent alors voir leurs volatilités modifiées. La détermination expérimentale de ces comportements, sur toute la gamme des situations rencontrées, est très coûteuse en moyens et en temps, car il s’agit véritablement d’une nouveau référentiel à bâtir.
Dans le cadre de la chaire de la fondation Tuck « Thermodynamique pour les carburants issus de la biomasse », un travail a donc été lancé en 2010 pour développer des modèles prédictifs permettant de déterminer par calcul les comportements de tels systèmes.
L’outil développé (équation d’état SAFT) a fait l’objet d’une évaluation sur différentes familles de produits, et une illustration en est notamment donnée par les travaux de la professeur invitée C. Gambini Pereira, de l’université Rio Grande do Norte, au Brésil, à l’occasion de son séjour scientifique à IFPEN en 2013-2014.
L’équation d’état SAFT
Dans le cadre de cette collaboration scientifique, un premier travail a consisté à étudier la solubilité de gaz dans des mélanges représentatifs de différentes huiles de pyrolyse, à la fois par une approche expérimentale et par une démarche de modélisation prédictive [1].
Plus récemment, le modèle développé a été employé dans les conditions de fabrication d’ester carburants, qui sont des molécules à longue chaîne, issus d’une réaction chimique entre des acides gras et des alcools. Cette réaction produit, outre l’ester qui est recherché, un produit dérivé, le glycérol, qui doit être séparé du mélange.
Or, il se trouve que dans certaines conditions, le glycérol peut décanter en une phase séparée, facilitant ainsi cette séparation. La description correcte de ce comportement est par conséquent nécessaire pour permettre un dimensionnement adapté du procédé et l’outil de calcul s’est avéré particulièrement fiable et descriptif de ce point de vue [2].
Corrélation entre simulation moléculaire et données expérimentales
(exemple du diagramme de phase ethyl laurate + ethanol)
Contact scientifique : Jean-Charles De Hemptinne
Publications
[1] C.G. Pereira, L. Grandjean, S. Betoulle, N. Ferrando, C. Féjean, R. Lugo, J.C. de Hemptinne, P. Mougin, Phase equilibria of systems containing aromatic oxygenated compounds with CH4, CO2, H2, H2S, CO and NH3: Experimental data and predictions, Fluid Phase Equilibria, 382, (2014), 219–234.
>> http://dx.doi.org/10.1016/j.fluid.2014.08.011
[2] C.G. Pereira, N. Ferrando, R. Lugo, P. Mougin, J.C. de Hemptinne, Predictive evaluation of phase equilibria in biofuel systems using molecular thermodynamic models, J. of Supercritical Fluids 118 (2016) 64–78.
>> http://dx.doi.org/10.1016/j.supflu.2016.07.025